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Julien Falgoux

Urban foot

Interview : Julien Falgoux, fondateur d’Urban Soccer et Urban Padel

C’est l’un des précurseurs du foot à 5 en France. Il y a 20 ans environ, Julien Falgoux lançait « Soccer 5 » à Clermont Ferrand. Devenu depuis « Urban Soccer », le groupe qui possède aujourd’hui 32 centres nourrit de grosses ambitions, que ce soit dans le foot à 5 ou bien dans le padel, sport qui « explose » en France ces dernières années. Pour en savoir plus sur ce succès entrepreneurial et les perspectives de développement, nous avons posé quelques questions à Julien Falgoux.

 

Sport Buzz Business : Quel a été votre parcours jusqu’au lancement des complexes de foot à 5 ?

Julien Falgoux : Je suis avant tout un passionné de sport, j’ai suivi la filière STAPS Management du sport, à Clermont puis à Orsay (Paris Saclay), avec un DESS « Management international du sport et des grands évènements sportifs » dirigé par Michel Desbordes.

J’ai tout d’abord travaillé avec Claude Michy, un clermontois, sur le Grand Prix de France Moto au Mans ou encore d’autres évènements notamment au Stade de France. Il a été mon mentor ! Il m’a donné cette vision de l’entrepreneuriat et de la rigueur dans le travail. En 1999-2000, je présente mon rapport de stage et j’obtiens les félicitations du jury. Je propose à Michel Desbordes d’en faire un livre, il n’y avait pas grand chose à l’époque sur l’évènementiel sportif. Il a trouvé une maison d’édition et nous avons écrit le livre. Il a été réédité 5 fois et traduit en espagnol, on en a vendu 15 000 exemplaires, j’en suis très fier. J’adore écrire mais je n’ai plus le temps… (rires)

En 2002, on lance avec Cédric Guelle notre première société d’évènementiel « S Event » et en 2004 on lance le premier « Soccer » avec Cédric et des copains de Clermont Ferrand. On propose alors un terrain de foot à 5 et des terrains de jorky,… Soccer 5 est né. Après Clermont, on a ouvert un centre à Saint-Etienne pour développer le concept. On avait vu le modèle anglais à l’époque, deux gros réseaux existaient mais uniquement avec des terrains extérieurs. Nous, nous souhaitions le faire en indoor, c’était le début d’une « révolution » dans la manière de pratiquer. On gérait notre boite d’évènementiel, les centres, le développement … pendant 4-5 ans c’était la folie avec une charge de travail dingue !

Puis nous avons voulu nous développer en franchises. Jean-Philippe Rey, alors Président des magasins Babou et avec qui on travaillait via notre société d’évènementiel nous demande alors pourquoi vouloir faire de la franchise ? Il a décidé de nous faire confiance et de nous aider avec des fonds nous permettant de développer et de maitriser nous-même le concept. Il nous a fait profité de son expérience dans le développement et dans l’immobilier.

On a alors ouvert à Limoges, Grenoble, Lyon, Bordeaux… En 2014, on fusionne avec Urban Football qui s’était développé surtout en région parisienne avec les fondateurs Victor Augais et Nicolas Warter. Aujourd’hui, Nicolas est resté avec nous, Victor est parti sur d’autres aventures. Nous sommes alors passés à 26 centres et avons fusionné les deux marques pour n’en faire qu’une : « Urban Soccer ».

SBB : Quels sont les chiffres clés d’Urban Soccer aujourd’hui ?

JF : On a réalisé 43 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2021 et nous devrions réaliser environ 50M€ en 2023. Nous avons 500 salariés dont 250 équivalents temps plein, sur 32 centres dont un à Lisbonne. Cela représente près de 300 terrains de foot à 5. La croissance est à deux chiffres avec une activité qui est toujours autant d’actualité, entre amis, sans contraintes, dans des structures haut de gamme. Au foot à 5, même si on n’est pas bon au foot, on se fait plaisir, on touche beaucoup plus de ballons, c’est plus ludique.

SBB : Votre offre est-elle complémentaire aujourd’hui de la pratique fédérale dans des clubs affiliés FFF ?

JF : La complémentarité est totale. Avant, pour jouer au foot, on devait jouer en club ou avec ses potes dans une cours d’école en sautant le portail ou dans la rue… Dans les clubs, on retrouve des entraînements, des matchs, c’est codifié, il faut accepter d’avoir un coach… La pratique est axée compétition et c’est l’ADN d’une fédération. Nous, c’est autre chose, on peut s’amuser avec ses amis, ses collègues de bureaux,…et surtout on peut faire les 2 !

On a initié un partenariat avec la FFF en 2018 avec un accord marketing et commercial. Nous mettons par exemple nos centres à disposition des districts pour organiser des évènements.

Côté marketing, nous proposons des anniversaires « Equipe de France » dans nos centres, avec un branding spécifique. Nous sommes complémentaires de la Fédération. On pense qu’il y a aujourd’hui 4 millions de pratiquants de foot à 5 en France et toujours 2 millions de licenciés FFF. Je pense que nous leur amenons des licenciés, on ne fait pas de compétition et on permet aux jeunes de découvrir la pratique. En progressant, ils vont alors dans les clubs.

SBB : Il y a la Business League tout de même, une compétition inter-entreprise c’est ça ?

JF : On proposait déjà des tournois et championnats destinés aux entreprises et oui effectivement nous avons racheté la « Business League ». On va poursuivre et amplifier le développement de cette offre premium qui bénéficie des meilleurs créneaux horaires, des équipements fournis aux participants, de la vidéo des matchs, des statistiques, de packs de communication pour pouvoir communiquer en interne etc Certaines sociétés viennent avec des supporters, c’est une véritable expérience pour les entreprises. Nous essayons de les regrouper par secteur d’activité si possible, ce qui permet également de faire du business et du relationnel, c’est fondamental.

SBB : Quelle est la répartition de votre chiffre d’affaires aujourd’hui ?

JF : La location de terrain représente un peu moins de 50% du chiffre d’affaires global. La restauration (bar, snack…) c’est entre 15 et 20%. L’activité « kids » représente également entre 15 et 20%, avec notamment la PSG Academy. 15 000 enfants participent à des stages et écoles de foot. Le samedi matin par exemple, nous avons 12 à 14 enfants par groupe, en indoor avec coachs, exercices, expériences PSG. Enfin, la Business League et autres évènements pèsent entre 15 et 20%. Nous organisons plus de 1 000 évènements dans nos centres chaque année et avons développé une agence spécifique : Urban Event. Nous avons enfin des produits annexes comme la vente d’équipements…

SBB : Si quelqu’un est intéressé pour monter un Urban Soccer, il ne peut pas le faire en franchisé avec vous donc.

JF : Non, l’ensemble de nos centres sont intégrés. Nous les ouvrons avec des responsables de centres salariés et quasi exclusivement issus de la formation interne avec des promotions et de la mobilité géographique.

SBB : Et comment réalisez-vous votre développement ?

JF : On cherche du foncier, des bâtiments, on fait donc aussi beaucoup d’immobilier. On gère aujourd’hui 150 000m2 d’espace de sports et de loisirs. Au fur et à mesure de notre développement, nous avons trouvé des sites qui correspondaient à nos critères mais trop grands. On a donc commencé à acheter des biens et à les louer avec notre société d’exploitation, mais aussi à d’autres spécialistes du sport et des loisirs. C’est à partir de là que nous avons créé le concept Urban village il y a 7 ans, avec des surfaces de 20 000m2 à Toulouse, 17 000m2 à Nantes… On y trouve Urban soccer, un Urban Padel, du fitness, des jeux enfants, des salles d’escalade … et on crée des synergies et des complémentarités entres les enseignes. Urban Village se fait un nom et devient un véritable lieu de destination.

SBB : Comment définissez-vous aujourd’hui votre métier ? A quoi ressemble votre journée type ?

JF : Si je devais résumer, je dirais que je suis le développeur. Je m’occupe de trouver de nouveaux sites, c’est moi qui cherche, discute avec les mairies… Je suis épaulé par une équipe sur ce travail de développement.

Je chapote aussi la partie marketing, commerciale, développement business… Nous sommes structurés en deux branches. Une branche opération avec l’activité des centres et une branche marketing. Chaque branche est dirigée par un DG adjoint, Romain Nibourel et Vincent Buisson. Ces deux branches, avec les services administratifs, représentent environ 50 personnes.

SBB : Quels seront les prochains complexes à ouvrir ? « Combien ça coûte » d’ouvrir un centre pour reprendre une formule bien connue ?

JF : On vient d’ouvrir au Mans et à Nantes. Nous avons un projet sur l’Ouest de Lyon qui pourrait ouvrir d’ici la fin de l’année 2023 j’espère… L’investissement pour un centre varie évidemment de la taille. On fait des centres hybrides avec football et padel, il faut compter entre 1 et 1,2 million d’euros pour une unité.

SBB : Concernant le padel, comment l’avez-vous intégré dans votre offre ?

JF : Le padel, on connait depuis très longtemps. Nous avions analysé le foot à 5 en Espagne et on avait découvert le padel. J’ai visité des centres il y a 20 ans environ à Barcelone et on avait compris le potentiel de la pratique et les similitudes. Le padel est au tennis, c’est que le foot à 5 est au football. On retrouve les mêmes notions de plaisir, convivialité, accessibilité… Lorsqu’on ouvre un marché comme on l’a fait pour le foot à 5, c’est beaucoup d’efforts, beaucoup d’énergie, c’est difficile de tout faire. Pour le padel, on savait que ça allait arriver, on le voyait venir…

Nous nous sommes alors dit que nous saurions développer le padel dans le futur. En 2015, on a fait 4 terrains de padel à Lille. Je pense qu’on a été un des premiers centres à en proposer. Nous avions de la place sur un complexe existant et on ne pouvait pas mettre de terrains de foot à 5 en plus, on s’est dit qu’on allait lancer le padel, apprendre, découvrir cette pratique, voir comment fonctionnent les deux activités ensembles. On a compris comment le business marchait. L’approche est différente du foot à 5 et on a commencé à regarder les opportunités. Et puis il y a eu le COVID… malgré tout nous avons poursuivi le travail sur les projets et aujourd’hui nous avons plus de 30 terrains de padel.

SBB : A côté du foot à 5 à chaque fois ?

JF : Oui mais avec une marque propre « Urban Padel », un parcours client dédié, des vestiaires dédiés … on vise les 100 terrains de padel minimum pour l’année 2024. Nous avons des projets dans les cartons et des centres full Padel verront le jour.

SBB : L’ambition est d’avoir des centres 100% padel ou toujours couplés avec foot à 5 ou autres loisirs ?

JF : Quand on peut coupler les deux c’est génial. Foot à 5 et padel, ça se marie très bien. Pour les offres B2B c’est bien. Beaucoup de joueurs de football jouent au padel, il y a pleins de passerelles… Sylvain Wiltord, notre ambassadeur, est en train de devenir prof de padel… Cela permet également de mutualiser nos charge fixes.

SBB : Comment on travaille et on optimise la rentabilité ?

JF : Aujourd’hui, une des clés sera d’avoir des grandes unités dans les très grandes villes, trouver les opportunités foncières, maitriser l’immobilier avec de bons investissements et du travail. Les charges fixes ne varient pas beaucoup, un club house, les vestiaires, du personnel pour accueillir les clients, c’est comme ça qu’on améliore la rentabilité.

SBB : Et le travail sur les fameuses « heures creuses » à remplir ?

JF : Remplir des terrains de 18h à 22h tout le monde sait le faire mais ça ne suffit pas pour être rentable. On a développé d’autres offres, à destination des enfants ou encore des étudiants avec des tarifs attractifs, 5€ la partie sur des créneaux intéressants pour les moins de 26 ans. Au total, nous réalisons environ 300 000 parties jeunes, foot et padel. Les offres B to B contribuent aussi à remplir ces créneaux.

Aujourd’hui, notre structure a une sorte de maturité et il existe encore des opportunités dans le foot à 5 ! La sortie de Covid a été incroyable avec un engouement populaire.

Sur le padel, il y a encore peu d’offres aujourd’hui. Les structures privées se développent petit à petit, les opportunités immobilières sont dures à trouver… L’offre va également évoluer, les clubs de tennis vont multiplier les terrains, plus en extérieur certainement. Il va falloir faire évoluer le métier. Sur les enfants, il n’y a rien pour le moment… il va falloir par exemple développer des écoles de padel.

SBB : Quels sont les partenaires d’Urban Soccer et Urban Padel ? Avez-vous une offre spécifique pour les annonceurs souhaitant toucher les pratiquants ?

JF : Nous travaillons avec Powerade, Heineken, Nike depuis 12 ans sur le football, on a quasiment 4 millions de passages à l’année dans nos centres, environ 1,5 million de visiteurs uniques à l’année… ça intéresse ! On distribue Nike également auprès des clubs avec une activité « teamsport », nous sommes dans les 5 plus gros distributeurs de Nike en France aujourd’hui. On équipe 15 000 enfants avec la PSG Academy… Depuis 3 ans, Pokemon est devenu un partenaire majeur pour les anniversaires. Pour le padel, nous avons un partenariat avec Head et BullPadel. On vend des balles, raquettes, du textile,…

Globalement, la cible est plutôt masculine sur le foot et mixte sur le padel, avec également une audience forte sur le digital. Nous proposons de la visibilité dans les centres, online, de l’échantillonnage, des évènements… on crée énormément d’activations.

Foot à 5, padel… C’est quoi les futures pratiques que vous pourriez proposer ? Le pickleball ?

JF : Je ne comprends pas le truc pour le moment avec le pickleball (rires)… mais oui le sport cartonne aux US notamment. L’escalade marche fort mais c’est un vrai métier, une pratique libre qui s’est bien développée. Il y a également les trampoline park mais on est plus sur du loisir.

Le Foot à 5 a encore beaucoup de potentiel, comme le padel. Sinon il y a des choses à faire, un vrai concept à développer sur le golf, avec une offre plus ludique, un concept comme Top Golf.

SBB : En tant que chef d’entreprise, quels conseils avez-vous à partager à de jeunes entrepreneurs ?

JF : J’ai toujours l’impression de dire des banalités sur ce sujet mais le travail, évidemment, toujours et pour beaucoup travailler il faut être passionné. Le travail ne doit pas être un gros mot mais une fierté. Il y a également le côté opportuniste. C’est souvent mal perçu, c’est un mot galvaudé mais au contraire je considère cette qualité comme primordiale, il faut savoir provoquer les opportunités puis les saisir.

Et puis on aime le sport, c’est le moteur ! Les valeurs du sport sont importantes. Il ne faut rien lâcher. On a connu des échecs… des fois des choses marchent et d’autres fois pas …

SBB : Quelles difficultés rencontrez-vous dans vos tâches ?

JF : Les ressources humaines, la gestion des centres, les problèmes techniques, les travaux, les barrières administratives… Un entrepreneur doit avoir la capacité à régler les problèmes. S’il n’y a pas de problème, tout le monde le fait. Si on considère les difficultés comme des problèmes c’est compliqué, si on considère ça comme des étapes à franchir c’est différent.

« Un entrepreneur doit avoir la capacité à régler les problèmes. S’il n’y a pas de problème, tout le monde le fait »
SBB : Avez-vous des projets de développement à l’international ?

JF : Nous avons un centre à Lisbonne comme évoqué un peu plus tôt, le centre marche bien et on va essayer de se développer encore au Portugal. Nicolas Warter notre associé est sur place. On s’est adapté en repensant certaines choses tant sur les produits que sur les services. Nous allons nous développer sur Lisbonne et Porto, nous étudions actuellement de belles opportunités.

SBB : Quel est votre état d’esprit en cette année 2023 ?

JF : On a passé une période COVID difficile en étant fermé pendant pratiquement 1 an… C’est dur à gérer. On en a profité pour travailler nos projets. Aujourd’hui, on a pu rembourser nos PGE, on a géré la société en bon père de famille. En post covid, l’activité est incroyable sur le foot à 5 et pour le padel, l’engouement est là. Il faut profiter de ces bonnes périodes, les feux sont au vert, on a plein de projets de développement et de l’énergie à revendre !

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