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Interview/ Alex Yama, Champion du monde de Kung-fu: "Quand on veut évoluer, il faut de la discipline"

L’étudiant Alex Yama livre les secrets de son triomphe devant des moines chinois lors du championnat du monde au prestigieux Temple Shaolin à Danphong dans la province de Enan en Chine en juillet 2024.

Vous avez récemment remporté le titre de champion du monde de Kung-fu. De quoi s’agit-il exactement ?

J’ai été champion intercontinental de kung-fu Shaolin en Chine dans le mois de juillet 2024. Bien avant, j’ai pris part à un championnat d’Afrique en Zambie où j’ai décroché une médaille d’or. C’est ainsi que j’ai obtenu mon ticket pour participer aux compétitions qui se sont déroulées en Chine, précisément à Danphong dans la province de Enan, au temple de Shaolin.

La compétition a regroupé environ 120 pays, venus de tous les continents. Nous avons confronté des techniques de performance c’est-à-dire des combats fictifs avec des adversaires qui n’existent pas. C’est à l’issue de cette compétition que j’ai décroché la médaille dont tout le monde parle aujourd’hui.

Comment l’Ivoirien que vous êtes, est-il parvenu à décrocher la médaille d’or devant des Chinois qui pratiquent le kung-fu dès le berceau ?

Quand on fait quelque chose de tout cœur, il y a de fortes chances que le résultat soit bon. J’étais en concurrence avec des pratiquants qui étaient effectivement très bons. Il y avait même des moines chinois parmi eux. C’est l’amour que je mets à m’entraîner et le temps que j’y consacre qui m’ont permis d’obtenir ce résultat. Je dois préciser qu’il n’était pas question de combat mais plutôt de confrontation de techniques. Chaque athlète était évalué par des juges. Chacun d’eux appréciait la bonne exécution ou non de nos techniques et nous attribue des points. C’est le total de ces points qui permet de déterminer le meilleur.

Quelle est la spécificité du kung-fu que vous pratiquez ?

Sachez que le terme kung-fu est en fait une déformation de Gun-fu qui, selon les Asiatiques, signifie bien faire. Le Gun-fu est donc à l’origine l’art de bien faire ce qu’on fait. Le kung-fu Shaolin, c’est le kung-fu wuchu, qui signifie en français les arts martiaux. Mais dans ce kung-fu wuchu, il y a différentes variantes. Moi, j’ai été champion dans le kung-fu pratiqué à main nue. Je réalise des performances rien qu’avec mes mains comme arme. Alors que d’autres peuvent réaliser des techniques avec des armes à la main, telles qu’une lance, une épée, un sabre, etc.

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Et qu’avez-vous obtenu comme récompense après la compétition ?

J’ai reçu une médaille d’or et un certificat.

Comment avez-vous accueilli ce sacre ?

J’ai plusieurs fois été champion national et j’ai même été champion d’Afrique en Zambie. Mais mon rêve, ça a toujours été de participer à un championnat du monde où j’allais confronter mes techniques avec des athlètes de haut niveau. Et quand, à l’issue de ce championnat, j’ai été déclaré vainqueur, c’était la joie, la fierté d’avoir hissé haut le drapeau ivoirien à l’extérieur.

Comment tout cela a commencé ?

Tout est parti d’Azaguié, le village de ma mère. C’est là, qu’à l’âge de 10 ans, je regardais déjà les films de karaté chinois des Bruce Lee, Jet Lee. Un jour, je me baladais et je me suis retrouvé devant un centre où des gens pratiquaient le kung-fu. Etant déjà passionné par cette discipline depuis ma tendre enfance, je suis entré pour les regarder jusqu’à la fin de l’entraînement. Comme ça m’intéressait d’apprendre, j’en ai parlé à un parent qui a fait ce qu’il fallait pour que je m’inscrive et commence l’entraînement.

C’est là-bas que j’ai eu toutes les bases du kung-fu. C’est là-bas que j’ai obtenu ma toute première médaille, une médaille de bronze, à l’occasion d’un championnat national. Après mon BAC, j’ai été orienté à l’université Félix Houphouët-Boigny de Cocody. En 2020, j’ai adhéré au club du campus, Uni-Wuchu où mon maître, Dr Kouassi Sélé Marius, m’a accueilli les bras ouverts. J’ai eu la chance d’y rencontrer plusieurs maîtres dont chacun m’a appris beaucoup et fait de moi ce que je suis aujourd’hui.

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Comment se passait l’entraînement ?

Quand je finis mes cours à l’amphi, je fonce directement en salle pour un maximum de deux heures d’entraînement. Je m’y mets à fond. Parfois, quand il y a des compétitions, j’ai tendance à mettre les études de côté pour me concentrer sur le sport. Mais quand arrivait la période des examens, je me concentrais plus sur les études. C’est ainsi que j’alternais sport et études de sorte qu’aujourd’hui, je peux dire que je suis bon dans les deux domaines, puisque je suis en Master 2 de droit privé.

Je dois admettre que ce n’est pas chose aisée, c’est épuisant aussi bien physiquement que mentalement. La preuve, avant d’aller participer au championnat d’Afrique qui s’est tenu en Zambie et par la suite au championnat international en Chine, j’ai été victime d’une luxation à l’épaule. J’ai dû observer trois mois de repos. A une semaine de mon départ, j’ai encore eu des soucis à l’épaule. Cela aurait compromis ma participation à ce championnat.

Faut-il observer une hygiène de vie pour réaliser les performances qui vous ont permis de décrocher cette distinction ?

Quand on veut évoluer dans tout domaine, il faut de la discipline, de la rigueur. Quand je finis les cours sur le campus, je rentre directement à la maison ou je vais au sport. Quand je sors de la salle de sports, je prends la route de la maison. Quand on veut être performant dans un domaine, il faut savoir s’éloigner de beaucoup de choses.

Est-ce qu’on peut consommer l’alcool tout en étant un athlète de haut niveau comme vous ?

Je ne dis pas que boire est une bonne ou mauvaise chose. En tout état de cause, c’est l’excès qui nuit. Mais si je m’en tiens à ma propre expérience, je peux dire que celui qui boit de l’alcool ou fume n’aura pas la même performance que celui qui ne boit pas ou ne fume pas. Celui qui fume beaucoup, par exemple, aura des difficultés respiratoires et ne sera pas endurant.

Il se dit également que le sexe n’est pas compatible avec la pratique d’un sport de haut niveau. Qu’en pensez-vous ?

Ça pourrait avoir un impact même si cela dépend de l’organisme de chacun. Comme je le disais tantôt, c’est l’excès qui nuit en toute chose.

Comment vous avez été accueilli par vos camarades à votre retour ?

Quand j’ai été champion d’Afrique en Zambie l’année dernière, mes amis ne savaient pas. Je le voulais ainsi parce que je savais que si mon entourage le savait, il allait désormais me voir différemment. Mais depuis le dernier sacre international, lorsque je passe avec mes camarades sur le campus, ils me regardent différemment. J’avoue que c’est un peu gênant.

Depuis votre succès au championnat international de kung-fu, vous êtes perçu comme un ambassadeur pour les jeunes en quête de repère. Avez-vous été honoré par la nation à travers ses démembrements que sont les ministères des Sports ou de celui de la Promotion de la jeunesse, du Service civique et de l’Insertion professionnelle ?

J’ai reçu les félicitations des uns et des autres, notamment de ma fédération, la Fédération ivoirienne des arts martiaux chinois, dont le président est maître Méïté Siaka. J’espère avoir un jour l’occasion de présenter aux premiers responsables du sport et de la jeunesse, cette distinction internationale, qui, au-delà de ma personne, honore la Côte d’Ivoire.

Vous êtes présent sur les réseaux sociaux où on vous voit jouer des scènes d’action en vous faisant appeler Naruto. D’où vous est venue cette idée ? Et pourquoi Naruto ?

J’ai voulu, à travers ces vidéos publiées sur les réseaux sociaux, montrer que nous les Africains, avons également du talent en matière d’arts martiaux. Naruto, c’est un manga que j’aime beaucoup et qui a aussi participé à mon évolution parce que le personnage de Naruto incarne le courage, la persévérance ; il ne lâche rien même quand est confronté à une situation difficile. C’est pourquoi je me suis attribué ce nom. Mon rêve, c’est d’évoluer plus tard dans le monde du cinéma.

ND avec L'Avenir

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