Édito : Onze ans d’attente, et toujours le même silence : que reste-t-il du football féminin ivoirien ?
Onze ans. C’est le temps écoulé depuis que l'équipe féminine de Côte d’Ivoire a foulé pour la dernière fois les pelouses de la Coupe d’Afrique des Nations. Une éternité sportive, lorsque l’on se souvient de 2014, cette parenthèse enchantée en Namibie où les Éléphantes avaient décroché une troisième place historique, installant l’espoir d’une nouvelle ère. À l’époque, tout semblait possible. Le football féminin ivoirien venait d’entrer dans la cour des grands. Mais depuis, la lumière s’est éteinte, et le pays n’a fait que regarder la CAN par écran interposé.
Les échecs successifs lors des qualifications pour les éditions 2016, 2018, 2022, 2024 et 2026 ne peuvent plus être attribués au simple hasard du sport. Ils témoignent d’un mal plus profond : celui d’un football féminin laissé en friche, tant sur le plan de la structuration que de la vision. Pourtant, la Côte d’Ivoire ne manque ni de talents, ni d’héritage. Des joueuses d’expérience comme Rébecca Elloh, Priscille Kréto ou Rosemonde Kouassi ont longtemps porté la flamme, tandis que la relève incarnée par Ouédraogo Habibou ou d’autres jeunes pousses n’a jamais cessé d’émerger. Mais à quoi bon produire des talents si l’écosystème censé les accueillir, les former et les projeter n’est qu’un chantier inachevé ?
La Fédération Ivoirienne de Football a bien tenté, ici et là, de relancer la machine : matchs amicaux improvisés, primes revalorisées, communication modernisée… Mais sans politique claire, sans championnat structuré, sans encadrement stable, ces initiatives ne sont que des rustines sur un pneu déjà crevé. Le football féminin en Côte d’Ivoire souffre moins d’un manque de volonté individuelle que d’un manque de stratégie collective. Et tant que ce vide persistera, les défaites seront plus prévisibles que les victoires.
Alors que le monde entier accélère sur la professionnalisation du football féminin, la Côte d’Ivoire, elle, reste immobile, prisonnière d’un souvenir glorieux qu’elle n’a jamais su transformer en projet durable. Il est temps d’admettre que l’exploit de 2014 n’était pas le début d’un cycle, mais l’exception d’une trajectoire mal maîtrisée. Reste désormais une question simple, mais urgente : combien d’années encore faudra-t-il attendre avant que les Éléphantes cessent d’être des spectatrices, et redeviennent des actrices sur la scène africaine ?
Noah Djédjé
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